VENDEURS VOLEURS Envahis de saletés, on ne peut s'empêcher d'y laisser traîner nos prunelles, pourtant. De la crasse accumulée, des bidonvilles rassemblés. Stocks volés, on vient pourtant à aller troquer, même à acheter, quand on souhaite réellement se l'approprier. Brocante fait jolie, pour résigner quelque chose aussi pourrie ; c'est l'antre des âmes souillées, des salopes que l'on vient acheter, pour une nuit à partager. C'est le stock volé des nouveaux arrivés, les poisons à partager, les couteaux, finement aiguisés, pour poignarder. La brocante des êtres démolis, des démons au souffle cendré. Venez chercher ici, quoique ce soit que vous voulez, mais il faut savoir qu'il y a un prix à payer. Quelques coups à donner, quelques gouttes de sang à verser.

VOITURES & ESSENCE Elles sont rares, ici, les voitures à circuler ; on en vient presque à partager, si l'on n'est pas une âme égoïste. Quelques voitures, là, stationnées, pour rouler dans les déserts infinis, pour se perdre dans les villes voisines. Une âme, là, assise, peut-être deux ou trois, qui sait, fusil verrouillé, prêt à flinguer n'importe qui souhaitant voler l'essence qu'il peut bien rester. Voitures un peu paumées, prêtes à se faire réparer. Motocross oubliés, quelques pièces éparpillées. Sans oublier, évidemment, la maigre radio, là, posée, qui ne cesse de chanter les paroles poussiéreuses d'Elvis.

LA TOUR DES ANGES Elle touche bientôt le ciel, là, devant tout, presque perdue dans le sable, cette tour maudite. On les dit sales ou alors chercheuses de pureté, les âmes qui sont là, élevées, à surveiller. Elles sont là, les âmes, prunelles braquées, à observer ce qui est en train de se dérouler. Gardiens du démon, qui sait, ils surveillent l'arrivée des anges, une armée à affronter. Et parfois, soudain, l'endroit se trouve à être tout bonnement abandonné ; les âmes, elles, parties se saouler.

SENTIER INFERNALE L'arène des dérangés, des enragés qui ne cessent de crier ; carcasses de bâtiments, accumulation de bois tanguant, de métaux griffant. C'est là, au travers de couloirs de fer et de demeures de terre, de métal, que les âmes s'éveillent et se fracassent. Combat de sang, sous le soleil tuant. Combat de coqs et de chiens, là, sous les prunelles émerveillées, ils ne demandent qu'à voir du sang versé, des âmes brisées. Pas juste un endroit, pas juste un bâtiment ; un quartier tout entier, un sentier vers l'enfer qui s'est égaré ; une antre entière, des âmes amères, petite descente en enfer.

DANSER SUR LES MORTS Cadavres abandonnés, dépouilles décomposées ; les égarés, là, qui ont essayé de s'échapper. Ceux que l'on a retrouvé, ceux que l'on a voulu montrer. Et puis ceux d'autrefois, là, que l'on voit de par leur nom gravé, et ces idiots, assis, presque installés sur les cadavres défigurés. Les rires déments qui ne cessent de s'élever, les bouteilles d'alcool qui s'abandonnent contre le sol. On crie, on rit et on meurt, là, dansant sur la tête des morts.

BIDONVILLES Ramassis d'objets trouvés, de planches trouées, de ferrailles rouillées ; les maisons, ici, elles ne sont pas finement bâties. Il n'y en a pas, ici, de matelas douillets, de repas bien faits. Trou à rats, ils sont tous là, empilés, assemblés, trop serrés. Âmes paumées, bien déchirées, saccagées, elles essaient d'exister avec le peu qu'elles peuvent bien trouver. C'est ici bas que la plupart se trouvent à cohabiter, perdus au travers des êtres massacrés, des déments libérés, tu es peut-être là, perdu, souillé, abîmé.